On peut apprecier au théâtre en ce moment à Paris (et jusqu’au 14 octobre) une pièce écrite et mise en scène par Alexis Michalik : Le porteur d’histoire.
Cett pièce est un cadeau, c’est tout simplement la plus belle pièce que j’ai vu à Avignon cette année et l’une des plus belles que j’ai vu ces dernières années. Mais elle présente en plus une qualité rare : elle est accessible à tout le monde, du plus jeune au plus vieux, du théâtrophage à la personne qui n’a jamais vu de spectacle vivant!
Ce texte nous narre une grande histoire à travers les temps et les lieux. On traverse plusieurs continents, on suit une quête, on est tout simplement transporté. Mais cette trame n’est pas le sujet de la pièce, le sujet ce sont les histoires… Les histoires tellement belles que le fait de savoir si elles sont véridiques n’a plus aucune importance comme le retranscrit l’extrait suivant :
« L’homme : Dans une de mes mains, il y a une pièce. Si vous tombez dessus, je continue mon histoire. Si vous tombez sur la main vide, vous n’aurez le droit qu’à la simple vérité
Alia choisit, main vide.
Alia : Encore
L’homme retend ses deux mains, elle choisit, main vide.
Alia : Encore une fois.
Une autre fois main vide. Elle ouvre l’autre main, de force : main vide. Les deux mains sont vides.
L’Homme : je n’ai rien d’autre à vous offrir que la vérité. Je n’ai pas trouvé le château perdu d’Adélaïde. Je n’ai rien trouvé que des livres, des histoires, et des rêveries. Je n’ai trouvé que du vent.
Alia, après un temps : Encore.
Martin passe les mains derrière son dos, puis les présente à Alia, encore une fois. Elle passe ses mains autour de la main gauche de Martin, et emprisonné celle-ci.
Alia : je choisis cette main. Maintenant, ouvrez l’autre.
Martin ouvre l’autre : elle est vide.
Alia : Si cette main est vide, alors celle que j’ai choisie contient une pièce.
L’Homme : vous y croyez? Vraiment? Vous croyez que la pièce existe?
Alia : la pièce existe plus que si je la voyais.
L’Homme : ça y est, vous êtes passée du côté des livres »
Une histoire peut mériter d’exister pour elle même et c’est ce que tâche de nous apprendre cette pièce. Si vous cherchez à connaitre la part véridique de ce récit vous n’en sortirez plus, si vous vous contentez d’apprécier, vous sortirez le sourire aux lèvres et le coeur éveillé.
Ce spectacle entre dans la catégorie incompréhensible de ces création qui frôlent la magie : les comédiens jouent à merveille, la musique fait raisonner les mots et la mise en scène est cette étrange rencontre entre une corégraphie milimétrée et le naturel de personnages en train de vivre.
On ne devrait pas oublier que le but d’un divertissement est de divertir. Cessons donc de nous demander si les protagonistes de Confessions Intimes existent vraiment si l’on est diverti par le programme. Et ce raisonnement peut s’appliquer à beaucoup d’oeuvres : sans les limites du réalisme, la création est sans limites!
Pour aller voir « Le porteur d’histoire » : A 19h30 au Théâtre 13, et ci-dessous une bande annonce…